Chronique Musique

Chronique : Mike Patton & Jean-Claude Vannier – Corpse Flower

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Groupe : Mike Patton & Jean-Claude Vannier
Album : Corpse Flower
Sortie : Septembre 2018
Label : IPECAC
Style : Avant Garde / Patton / Serge Gainsbourg
Note: 17,5/20


A ma gauche Mike Patton, chanteur et musicien qui multiplie les projets (Faith No More, Mr. Bungle, Fantômas, Tomahawk, Dead Cross…) ou les collaborations (John Zorn, Kaada, Massive Attack, Nora Jones, Bjork…). L’homme est un touche à tout, du metal à l’expérimental, l’américain aime les expériences.

A ma droite, Jean-Claude Vannier, illustre compositeur et arrangeur français. Le bonhomme est connu en particulier pour son travail avec Serge Gainsbourg sur Histoire de Melody Nelson (1971). Cependant il ne faudrait limiter Monsieur Vannier a ce disque, puisqu’il est aussi derrière quelques tubes de Claude Nougaro, Brigitte Fontaine, Françoise Hardy, Michel Polnareff, Alain Bashung, ou bien encore de Juliette Gréco, excusez du peu.
Au centre, Corpse Flower, une rencontre transatlantique impossible, mais au combien logique lorsque l’on connait l’amour des deux hommes pour Serge Gainsbourg.
Mike Patton n’a en effet jamais caché l’influence que pouvait avoir le fameux chanteur français. On a d’ailleurs pu découvrir cela en France grâce à l’album hommage Great Jewish Music : Serge Gainsbourg (produit par John Zorn) où le chanteur de Faith no More reprenait « Ford Mustang », parmi d’autres titres et interprètes plutôt peu connus du grand public. Mais revenons à notre album…
Corpse Flower est ce que l’on pourrait appeler un album bazar (un condensé de trucs et de choses dont seul Patton a le secret). C’est Mike Patton qui a eu l’idée du projet et je dois dire que le résultat, derrière ces expérimentations est plutôt réussi.
D’une manière générale, l’album ne me surprend pas, connaissant l’homme et ses projets solos, je m’attendais à bien plus barré. Peut-être Jean-Claude Vannier a t-il pu maîtriser un peu le doux dingue. Quoi qu’il en soit, les titres qui composent l’album sont de nature à être le rêve de Patton, travailler avec celui qui a composé Histoire de Melody Nelson. Et cela s’entend.
C’est étrange, plutôt éclectique, partant dans beaucoup de directions (années 70, Rock, avant gardiste, Pop, Brit Pop, Variété Française) on ne peut évidemment penser qu’à l’original, Serge Gainsbourg et Histoire de Melody Nelson.
Mais le duo va plus loin. Bien accompagnés et même très bien accompagnés diront certains (Smokey Hormel (Beck, Johnny Cash), Justin Meldal-Johnsen (Beck, Air, Nine Inch Nails) et James Gadson (Beck, Jamie Lidell), mais aussi de Denys Lable, Bernard Paganotti (Magma), Daniel Ciampolini, Didier Malherbe, sans oublier le Bécon Palace String Ensemble) ça pète dans tous les sens, grâce à des orchestrations luxueuses et une poésie baroque aux atmosphères… lancinantes à défaut d’être parfois louches ou loufoques…
Tiens, apprenez par exemple que le premier titre « Ballad C.3.3 », est issu de La ballade de Reading Gaol d’Oscar Wilde. Si vous trouvez ce titre assez soft pour du Vannier, « Camion » va vous réconcilier avec l’homme et son passé un peu foufou. Patton est dans son élément, avec sa voix si chaude.
Le rien à foutre semble être le thème de Corpse Flower tant les deux hommes abusent de choses qui aujourd’hui pourraient bien encore choquer des gens. En 71, Serge Gainsbourg n’en a aussi que faire. Lorsque Patton chantonne que les chansons d’amour sont des chansons de merde (amère en fait) … Quel culot ! Il fait d’ailleurs passer le titre pour une ballade langoureuse, même avec ses « doudidou » à la Jane Birkin pas forcement adroits. « Cold Sun Warm Beer » aurait quant elle eu sa place sur un Mr Bungle. « Browing » est un hit, hymne. Je conseille vivement à Tarentino d’utiliser ce titre pour l’un de ses films. Evidemment ce bon vieux Serge reste dans l’ombre, avec des sonorités que l’on retrouvaient sur ces disques.
Le titre éponyme en fera sursauter certains. Patton mélangeant anglais et français pour énoncer ce qui fait de la France sa renommée. Ne soyez donc pas surpris d’entendre filet mignon, lardon et Coco Channel ou bien les plus belles insultes du pays criées par des femmes entre deux énumérations de bouffe telles pieds de cochon ou bien encore coq au vin… Du grand art qui rappellerait presque La Grande Bouffe et qui ravira forcément les vegans (la bonne blague).
On sent tout de même que si les compositions sont signées en partie du français, l’américain n’est quant à lui pas en reste sur d’autres. « On Top of the World » et « Yartd Bull » rappellent tous deux Fantômas, avec ce côté cinéma évident.
Patton déploie ici juste une partie de son talent. Vocalement il excelle et ne fait aucune faute de goût. On retrouve une large facette de ses capacités et a su rester sobre, ne dévoilant qu’un peu du crooner qu’il sait être notamment sur le final « Pink and Blue ».


Personnellement, je n’ai pas grand chose à reprocher à cet album où Vannier, grâce à Patton, fait un gros doigt d’honneur à ceux qui l’on oublié, ceux qui l’ont enterré ou bien encore ceux qui le pensaient ringardisé.
Pour certains, il sera difficile de supporter Patton, pour d’autres, ce seront les délires de Vannier qui seront indigestes, mais tout cela s’apprivoise et peut-être se mérite aussi. De là à dire que ce duo n’est destiné qu’aux amateurs, à une élite il n’y a qu’un pas. Et alors j’en fait parti et j’en suis fier.
Corpse Flower est un album qui en met plein la gueule

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